4 mafieux français devenus tristement célèbres

Jean Jérôme Colonna

On pourrait croire que la mafia n’existe qu’en Italie, aux Etats-Unis ou du côté de l’Asie mais la France est, elle aussi, marquée par la forte présence d’un milieu mafieux sur son territoire. Ce « mitan » (milieu) est né à Marseille dans les années 1920. Aujourd’hui, on parle davantage de « grand banditisme » pour designer le crime organisé en France. Quelques régions de France fut pendant longtemps sous la coupe de « Parrains » très puissants dont les activités criminelles s’étendaient du trafic de stupéfiants au braquage en passant par les jeux d’argents et le proxénétisme. Nombreux de ces mafieux se sont éteints aujourd’hui mais leurs noms résonnent encore…

Jean-Jérôme Colonna

Jean-Jé, comme on l’appelait en Corse, est né le 24 juin 1939 à Sartène. Il fait partie des grandes figures du milieu Corse et plus particulièrement de la partie Sud. Jean-Baptiste Jêrome s’était même vu s’offrir le surnom de « bandit d’honneur » car pendant une bonne partie de sa vie, ce mafieux Corse s’était juré de venger son père. Ce dernier avait été assassiné devant ses yeux alors qu’il n’avait que 16 ans. En 2002, Jean-Jé Colonna expliquait n’avoir aucun remord :

« Je ne suis ni fier ni honteux de ce que j’ai fait »

Confession faite au mensuel Corsica lors d’une interview de 2002

La force de Jean-Jé Colonna est qu’il a gardé pendant très longtemps un casier vierge de toute condamnation. Pourtant, en 1974, le baron Corse est arrêté par les stups de Marseille. Son implication dans l’affaire de la French Connection lui vaudra une inculpation pour trafic de stupéfiants. Six mois plus tard, Jean-Jé se fait la malle alors qu’il est hospitaliser à l’Hôtel Dieu. Le fugitif trouvera refuge au Brésil, aux Etats-Unis et reviendra sur ses terres de façon anonyme. Alors que ses anciens complices se font épingler pour trafic de stupéfiants, Jean-Jé sera condamné en son absence à 17 ans de prison.

Jean Jérôme Colonna

Jean-Jérôme Colonna – Source Image : www.tf1.fr

En octobre 1978 la bande est de nouveau rejugée sauf… Jean-Jé Colonna. Ses comparses vont écoper de peines encore plus lourdes alors que « le parrain corse » verra la cour d’appel oublier comme par miracle de juger son cas dans les délais légaux. Le temps passe et la prescription s’appliquant, sa condamnation initial disparaît. Son casier est donc de nouveau vierge. Jean-Jé est de retour aux affaires sur le territoire français à partir de 1985 et c’est à ce moment précis qu’il démarre sa vraie  carrière de « baron corse ». Mais ce dernier s’est toujours défendu de cette appellation. Pour Jean-Jé, il n’est pas le « le parrain corse » comme la presse l’évoque à cette époque.

En 2002, Jean-Jé est poursuivi par la justice pour des intérêts occultes mais il sera lavé de tout soupçon (après une cavale de deux ans) en 2005. Il écopera cependant, d’une peine de 3 ans de prison pour un seul motif : emploi fictif. S’étant pourvu en cassation, cette condamnation n’a jamais été inscrite à son casier judiciaire : chapeau l’artiste !

Jean-Jé Colonna est finalement décédé dans un accident de la route le 1er novembre 2006 près de Porto-Pollo, un accident qui aura fait couler beaucoup d’encre. Sa mort va totalement déstabiliser la Corse du Sud qui verra les règlements de compte se succéder les uns après les autres.

Tany Zampa

Tany ZampaGaëtant Zampa, de son vrai nom, est né officiellement à Marseille le 1er avril 1933. Officiellement car son père, un ex-voyou de Marseillle, Mathieu Zampa, ne voulait pas qu’il naisse en Mars. Dans la légende napolitaine, le mois de mars est celui des fous.

Élevé à bonne école, Gaëtant Zampa fera ses premières armes en tant que proxénète dans le quartier Saint-Lazare, dans les années 1950. A cette époque, il est n’est pas encore majeur. En 1953, Zampa exfiltre Gaston Deffere d’une manifestation communiste en brandissant une mitraillette en plastique. Il sera invité à une soirée et remercié par Gaston Deffere. Lors de cette soirée, Tany Zampa aurait lancé à Gaston, avec beaucoup d’arrogance : « l’homme le plus puissant de Marseille, c’est pas vous, c’est moi ». Ce jeune flambeur est déjà à la tête de l’hôtel Réal à moins de 25 ans. Respecté des anciens (Antoine Guérini, Robert Blémant, Paul Mondoloni…), Tany Zampa se rendra du côté de Paris à partir de 1955 pour débuter un juteux trafic de racket auprès d’hôteliers parisiens.

Tany Zampa et la « Bande des Trois Canards » donneront également dans le proxénétisme et dans les jeux d’argents.

L’année 1960 marquera le premier gros coup de Zampa. Le 31 décembre 1960, Tany Zampa et ses complices vont réussir un braquage de haut vol à la Caisse d’Allocation Familiales des Bouches-du-Rhône. Ils en ressortiront avec plus de 1,6 millions de franc. Malheureusement pour lui, son côté flambeur reprendra le dessus et il se ventera un peu trop publiquement de cet exploit. Son implication dans le braquage bien qu’encore floue, Zampa sera envoyé au trou pour 4 à 5 années de prison.

Tany Zampa est un personnage redouté sur la Côte d’Azur. Particulièrement impulsif et violent, même les frères Guérini n’oseront pas s’attaquer à lui. A l’inverse, Zampa n’hésite pas à se débarrasser des personnes devenues gênantes. Jean Toci, Gaby Regazzi, Bimbo Roche, Gérard Vigier, Gilbert Hoareau dit Gilbert le Libanais, ou encore Jacky le Mat en savent quelque chose…

Robert Blémant, un ancien policier français, membre du milieu marseillaise sera assassiné le 4 mai 1965 sur ordre d’Antoine Guérini. Ce meurtre affaiblira très clairement le clan Guérini et laissera plus de place au clan Zampa qui en profitera pour récupérer les établissements de nuit de la région. Ses années de prison ne l’empêcheront pas de se marier et de continuer à prospérer sur la ville. En 1967, c’est au tour d’Antoine Guérini d’être abbatu. La plupart pense qu’il s’agit d’une vengeance de Zampa envers Robert Blémant.

Après cet épisode, Zampa va entrer en conflit avec un autre gros baron : Francis le Belge. Une guerre sanglante va éclater entre les deux clans et nombreux de leur soldat vont tomber sous les balles :

  • Du côté de Francis le Belge : Robert Di Russo, Jean-Claude Bonello et Daniel Lamberti seront abattus le 5 septembre 1972 au Cannet.
  • Du côté de Zampa : Joseph Lomini dit le Toréador, Ansan Bistoni dit l’Aga Khan, Jean-Claude Napoletano, un petit truand, et la patronne du bar seront tués au bar du Tanagra.

Une rumeur voudrait que le clan Zampa n’est pas voulu assassiner Francis le Belge en plein cœur de Paris alors qu’il était sans protection car il se trouvait au côté de sa mère. Les mafieux ont parfois un cœur…

En 1975, Tany retournera en prison (8 années) pour port d’arme. A sa sortie, il reste un problème à régler pour Zampa : le cas Jacky le Mat. Son influence et son évolution dérange Tany qui tentera de l’assassiner le 1er février 1977. Jacky se venge un mois plus tard et douze personnes tomberont dans les deux clans mais c’est bien Jacky le Mat qui en sortira vainqueur.

Rattrapé par la police et son clan affaiblit, Tany Zampa finira par sombrer dans la folie ce qui lui vaudra quelques surnoms : « parrain à l’italienne », la « marraine » ou encore la « balance ». Tany Zampa finira par se suicider (par pendaison) le 23 juillet 1984, dans sa cellule des Baumettes. Après un long coma, Zampa finira par mourir le 16 août 1984 à 51 ans.

Les frères Hornec

Jean-Claude, Marc et Mario Hornec sont des figures tristement célèbres du grand banditisme français. Ils sont originaires d’Allemagne et sont issus de la communauté Manouche sédentarisée de Montreuil-sous-Bois.

La famille Hornec s’est installée en France, en 1950. À la mort, de leur père, les trois frangins reprennent son activité de ferrailleur. C’est, à partir de 1980, que les choses se gâtent et que le clan dérive vers l’illégalité la plus totale.

Pour éviter les soupçons, les « H » vont se séparer et s’associer à des personnes de confiance : gitans et magrébins en grande partie. Le clan se fera un nom dans le domaine du braquage et débutera son ascension à partir de 1989. Les frères Hornec souhaitent reprendre les activités de Genova mais les heurts et les assassinats vont s’enchaîner. Le 22 août 1994, Claude Genova est assassiné alors qu’il devait s’expliquer avec les frères « H » pour mettre fin à cette guerre de clans.

Les frères Hornec

Les frères Hornec – Source Image : www.tf1.fr

Par la suite, le clan Hornec réinvestira son argent des braquages dans les bars, restaurants et boîtes de nuit de la région parisienne. Les frères Hornec se dirigeront ensuite vers le cannabis, mais les ex-associés de Genova feront connaître leur désaccord en incendiant deux boites du clan Hornec et un restaurant.

L’un des deux assassins de Claude Genova (Jean-Dominique Poletti) est assassiné à Boulogne-Billancourt le 3 août 1995. La fuite de son complice en Algérie, permettra de calmer le litige entre les deux groupes.

Les frères Hornec connaîtront leur apogée entre les années 1995 et 2005. Le clan est formé d’une trentaine de membres et s’entoure d’un réseau de mafieux réputés tels : Charles Bauer, Pierre Dorkel, Marc Vassout…

Marc Hornec gère les investissements de la famille pendant que Jean-Claude, l’ainé, prend les décisions stratégiques. Le premier se fera épingler en 1997 dans un hôtel d’Eurodisney. Il sera condamné à 4 ans de prison ferme suite à la découverte de 550 kilos de cannabis. Peu avant, en 1995, Marc avait forcé un braquage à Cagnes-sur-Mer alors qu’il était recherché par la police pour trafic de stupéfiants.

Malgré de nombreux soupçons, Mario et Jean-Claude Hornec garderont un casier judiciaire vierge jusqu’en 2006.

Le 24 décembre, James Hornec est assassiné. Le fils de Mario Hornec avait pourtant le parfait profil pour reprendre les activités de son père et de ses oncles. Cet assassinat marque le début du déclin du clan. Le 15 novembre 2006, Mario et Jean-Claude Hornec sont mis en examen pour un trafic portant sur 136 kilos de cocaïne importés par l’intermédiaire des cartels colombiens.

Le clan Hornec subira une vague d’arrestations internes qui l’affaibliront petit à petit. Le 7 mars 2014, Jean-Claude Hornec et son fils sont interpellés dans le cadre d’un trafic d’enfouissement de déchets. Les deux comparses risquent jusqu’à tente ans de prison.

Francis le Belge

Francis le BelgeFrancis Vanverberghe était le « parrain » du milieu marseillais et le grand ennemi de Tany Zampa. Né en 1946, il fut assassiné le 27 septembre 2000 dans un café parisien, à proximité des Champs-Elysées.

Francis le Belge fait ses premiers pas dans le quartier de la Belle de Mai et rêve d’une carrière de footballeur. À l’âge de 16, Francis se blesse et dit adieu à l’Olympique de Marseille. À la place, c’est une carrière de brigand qui lui tend les bras.

À 19 ans, Francis le Belge est condamné à quinze mois de prison ferme pour proxénétisme. Dès 1968, alors que le jeune marseillais n’a que 22 ans, son nom est inscrit au fichier du grand banditisme français.

En 1972, Francis se fait escroquer de 600 000 francs par Tany Zampa. Une guerre sans merci aura lieu entre 1972 et 1973. Arrêté par la police pour proxénétisme aggravé, détention d’armes et usage de faux papiers, un sursis est offert à Francis à la fin de l’année 1973. De plus, le Belge est condamné à 12 ans de prison pour trafic d’héroïne en 1977. Son implication dans la French Connection est les trafics de drogue auront eu raison de lui. Finalement, Francis purgera 7 ans de prison à la centrale de Poissy et passera, au total, près de 11 années derrière les barreaux.

À sa sortie, le marseillais semble plus calme et plus réfléchis. Pourtant, il reprendra rapidement ses affaires depuis le Nord de la France (Francis fut interdit de 3 régions de France dont la région PACA).

En 1986, le Belge se fait balancer par François Scapula au sujet de l’héroïne. Francis en cavale, se fait rattraper en 1988 et passera de nouveau, 4 années en préventive avant d’être relâché.

Après la « Guerre des boites » qui durera de 1988 à 1994, Francis décide d’abandonner Marseille et s’exile à Paris. Là-bas, Francis refera sa vie avec Lydie Fleury, sa nouvelle compagne avec qui il se mariera le 22 mars 1996. Le Belge profitera de la vie parisienne pour blanchir l’argent sale issu de la prostitution et des machines à sous.

Le 27 septembre 2000, Francis le Belge tombe sous les balles d’un commando à moto dans un café de course prestigieux « L’Artois Club ». Le garde du corps de Jamel Debbouze sera inquiété, puis relâché avant de se faire, lui aussi, assassiner. Les Frères Hornec sont aussi dans le viseur de la police judiciaire, mais la piste la privilégiée et qui semble la plus juste est celle de la Bande de la Brise de Mer (clan corse).

En octobre 2002, c’est la fin du clan Vanverberghe avec l’assassinat de deux neveux du Belge.

D’autres noms auraient pu faire partie de cette liste à commencer par Jacques Mesrine évidemment, Rédoine Faïd, Pascal Payet, Paul Carbone, François Spirito, Jacky le Mat ou encore Paul Mondolini… Une autre fratrie a également laissé une emprunte indélébile sur la France : les frères Zemmour. Le grand banditisme en France est un milieu très spécial qui ne ressemble pas vraiment aux mafias traditionnelles que l’on retrouve en Italie, dans l’Est de l’Europe ou en Asie. Vous noterez d’ailleurs qu’en France, on ne parle pas de « Mafia » mais de « Grand Banditisme ».

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